samedi 31 mai 2008

Dans un cercueil de verre


Dans un cercueil de verre,

J’ai déposé mes espoirs,

Et mes amours délétères,

Au milieu des roses noires.

Le vent mauvais a balayé

Les pétales de mes certitudes

Et les nuages ont pleuré

Sur l’ombre de ma solitude.

Un ange surgi de nulle part,

A effleuré d’une aile légère,

Mon cœur froid et hagard,

Et l’a réchauffé de sa lumière …

dimanche 25 mai 2008

Les choses immuables


Bonne fête Maman !

Les choses immuables

Je n’ai rien demandé,

Rien décidé

De tous ces ouragans,

Ces sentiments,

Ces océans

Qui ont déferlé sur ma vie.

Je me croyais à l’abri,

Invincible derrière mon clan,

Mon sourire ultra blanc,

Mes rêves vif-argent.

Puis j’ai appris les absences,

Le néant de l’impuissance.

En cherchant mon printemps,

J’ai aimé contre le vent,

J’ai ri et pleuré souvent.

Mais il est des choses immuables,

Dieu les a gravées dans chaque grain de sable :

Le regard pur d’un enfant,

Les mots d’amour des amants

Le cœur d’une maman …

mardi 20 mai 2008

Tu es ....


(illustration publiée avec l'aimable autorisation de Plume d'Ange - http://mandala.romandie.com/category/3928/9946)

Tu es la partie arc-en-ciel

De mon cœur,

les ombres sont fugitives

Et les nuages deviennent roses.

Tu es le coin rêve

De ma vie,

je brode l’illusion

En délicates dentelles d’espoir.

Tu es la bulle irisée

De mon bonheur,

Douceur tendre et fragile

Au creux de mon univers.

Tu es le refuge tendresse

De ma solitude

La citadelle contre laquelle

Se brisent peurs et pleurs.

Tu es la petite flamme

Dans mon âme,

Jamais éteinte, toujours vive,

Qui me réchauffe de son amour.

jeudi 8 mai 2008

La déesse et le lutin


La déesse et le lutin

Par une belle nuit de printemps une silhouette lumineuse descendit de l’Olympe. Une des déesses (je ne vous dirai pas laquelle) avait envie de s’éloigner du panier à crabes divin. Elle s’en éloignait même à grands pas et de fort mauvaise humeur. Elle en avait plus qu’assez de l’égocentrisme développé à l’extrême de ses collègues masculins et des disputes continuelles qui agitaient le petit monde des dieux. Elle arriva au bord de la mer et plongea voluptueusement dans les petites vagues sombres. Le spectacle était si beau, que la lune et les étoiles suspendirent leur course dans le ciel pendant un moment pour la regarder se baigner. En quittant l’Olympe, elle avait simplement pensé se cacher un moment dans l’un de ses sanctuaires, le temps de se calmer, mais maintenant elle avait soudain envie d’aller plus loin. Envie de quitter ce monde connu pour partir à l’aventure. Elle sortit de l’eau et regarda vers l’ouest …

Elle se retrouva au bord d’une autre mer, bien plus sauvage, bien plus froide, qui miroitait en gris bleu, et en vert. Le ciel était d’un azur plus pâle, l’air était chargé d’un fort parfum d’iode. La forêt qu’elle pouvait apercevoir au-delà de la lande derrière elle était d’un vert tendre, toute habillée de la beauté de ses feuilles à peine écloses. C’est vers elle qu’elle se dirigea. Quand elle y pénétra, elle tomba en admiration devant ce temple de verdure. Elle salua chaque arbre. S’enfonça dans la futaie. Elle découvrit avec bonheur une source, qui se déversait dans une sorte de vasque naturelle, et elle ne résista pas à l’envie de s’y baigner. Bien que l’eau fût fraîche, elle s’y attarda avec plaisir, jouant dans l’onde cristalline. Au bout d’un moment, elle eut l’impression d’être observée. Elle regarda un peu partout alentour, mais ne vit personne. Pourtant elle était sûre de ne pas être seule. Tout d’un coup, elle vit bouger les fougères sur sa droite et elle se matérialisa juste à cet endroit là. Un minuscule petit être vêtu de vert se tenait là et regardait avidement le bassin à travers les fougères. La déesse se pencha et c’est alors seulement que le petit bonhomme en vert se rendit compte qu’elle se trouvait là, au dessus de lui et non plus dans l’eau et il poussa un hurlement strident. Elle le cueillit doucement avant qu’il ne réussisse à s’enfuir et le souleva. Il devait mesurer au plus une vingtaine de centimètre, ne pesait presque rien, ressemblait à un petit homme en miniature avec des oreilles pointues, était ma foi fort joli garçon, mais pour l’heure totalement terrorisé. Il cessa un peu de trembler quand il se rendit compte que la main qui le soutenait était douce et que la belle femme devant lui n’avait absolument pas l’air hostile. Elle lui sourit et lui demanda gentiment s’il avait l’habitude d’épier les inconnues qui se baignaient (et si vous vous demandez par quel miracle la déesse et le petit homme aux habits couleur herbe pouvaient se comprendre, n’oubliez pas que nous sommes dans un conte et que tout est possible J ). Le petit être se redressa, retrouva un peu de sa superbe et de son insolence naturelle pour répondre crânement : « Je suis un lutin et comme tous les lutins je suis curieux. Et moi je suis tout particulièrement curieux en ce qui concerne les humains, ou plutôt les humaines même. Mais il est rare d’en rencontrer au plus profond des bois. Alors pour une fois que je pouvais observer une de ces géantes à loisir dans ma forêt, je n’allais pas me gêner. Et toute nue en plus … mon rêve ! » L’éclat de rire qui répondit à cette déclaration, le déstabilisa quelque peu, mais il n’avait plus peur du tout. De fraîche au sortir de l’eau, la main douce qui le tenait était devenue chaude et il s’y sentait étonnamment bien. La belle jeune femme en face de lui s’arrêta de rire et lui dit doucement : « Désolée, petit lutin, je ne suis pas une humaine, je suis une déesse ! » Pendant qu’elle parlait ainsi sa beauté naturelle se transformait peu à peu en quelque chose de lumineux et d’infiniment beau et intimidant et le lutin resta assis dans la main de lumière, bouche bée d’admiration. Elle reprit peu à peu une apparence normale et relevant le menton du petit bonhomme d’un doigt taquin, elle expliqua : « Et pour les déesses la nudité est une chose très naturelle, elles la portent avec autant d’élégance que les tuniques de soie fine. Tu as encore beaucoup de choses à apprendre. D’ailleurs nous allons commencer dès maintenant. »

Avant d’avoir pu répliquer, le lutin se retrouva tout nu lui aussi, assis sur l’épaule de la Déesse qui se baignait de nouveau dans la vasque près de la source. Il cria de peur et de colère et se serra contre le cou de la baigneuse. Elle lui demanda moqueuse s’il criait parce qu’il était nu ou parce qu’il ne savait pas nager. Il répondit rageusement qu’il savait nager comme tous les lutins. Elle le prit alors très délicatement et le posa dans l’eau. Il adorait l’eau et oublia bientôt sa colère. Ils jouèrent un bon moment dans la vasque et quand ils sortirent de l’eau elle les sécha tous les deux d’un seul souffle tiède et très doux. Pendant qu’elle s’y employait, le lutin ne pouvait s’empêcher de regarder son grand corps parfait, et soudain il se rappela qu’il était nu aussi et s’échappa pour chercher ses petits habits verts. « Pas si vite, mon petit lutin » dit une voix près de lui, « tu as eu l’outrecuidance de jouer au voyeur, tu apprendras donc à supporter la même chose. Je pense que la leçon sera salutaire. Je te rendrai tes habits, quand je me rhabillerai moi-même. » Il eu beau bouder, menacer, crier, elle resta inflexible. Et quand elle lui rendit ses vêtements, elle murmura à son oreille : « Je t’appellerai Hero. » « Mais ce n’est pas du tout mon nom ! » hurla-t-il furieux. « D’ailleurs, je ne vais pas te le dire. Les lutins n’avouent jamais leur vrai nom, pour empêcher qu’on ne l’utilise à des fins magiques ». « Ton vrai nom, je finirai bien par le savoir, mais moi, je vais t’appeler Hero, car tu me rappelles une grande dame de là d’où je viens, elle s’appelle Hera et comme toi, elle est insolente, boudeuse, colérique, curieuse, râleuse et très jolie. Ah, j’oubliais, elle est extrêmement jalouse aussi, mais je ne sais pas encore si tu lui ressembles sur ce point … Et maintenant, j’aimerais bien connaître les tiens, car je suppose que tu n’es pas le seul de ton espèce ici. »

Subjugué Hero guida sa Déesse à travers l’enchevêtrement des fougères et des arbres centenaires vers son peuple. La nuit tombait, seuls quelques timides rais de lumière flottaient encore entre les frondaisons, quand une clairière apparut. Le lutin demanda à la Déesse de rester sous le couvert des arbres pendant qu’il avertirait les siens de sa présence. Dans l’ombre naissante, elle vit de minuscules lumières qui s’allumaient de ci de là et de menus bruissements dans les hautes herbes accompagnés de légers murmures, permettaient de deviner une activité certaine. Au bout d’un moment Hero revint la chercher. Elle le suivit belle et sereine jusqu’au milieu de la clairière et sans voir personne encore, salua à la ronde. De nouveau le phénomène lumineux se produisit et elle redevint cet être de lumière irréel de beauté qui avait tant frappé notre lutin. Dans l’obscurité tout le peuple des lutins retenait son souffle. Mais bientôt ce fut simplement une ravissante jeune femme en tunique blanche qui s’agenouilla dans l’herbe. Le plus ancien des lutins s’avança alors pour lui souhaiter la bienvenue et bientôt ce fut un défilé incessant. Chacun voulait la voir de près, la toucher, l’entendre. Fier comme Artaban, Hero s’était planté tout à côté d’elle et ne bougeait pas d’un iota, de peur de se faire prendre sa place. Finalement cette Déesse c’est lui qui l’avait trouvée. Il y eut un festin de fleurs, de baies et de miel, mais personne ne pensait vraiment à manger, il y avait trop de questions à poser, trop de choses à apprendre de part et d’autre. La soirée passa bien trop vite. Les lutins invitèrent la déesse à passer la nuit avec eux, mais elle choisit un joli petit nuage cotonneux qui passait au-dessus d’eux, le cala entre les couronnes des vieux arbres et s’y installa pour dormir. Un sourire paisible jouait sur ses lèvres, quand elle sombra dans le sommeil.

Sous elle dans la forêt, plus d’un lutin rêva d’une déesse lumineuse, cette nuit là. Mais l’un d’eux rêvait d’une naïade nue et rieuse qui se baignait avec lui.

Très loin de là, le Mont Olympe était beaucoup moins paisible. Depuis quelques heures, Zeus tempêtait en constatant la disparition d’une de ses déesses. D’abord il s’était inquiété et avait envoyé Hermès à sa recherche. Mais il revint bredouille et ni Eole, ni Helios parcourant eux aussi la terre, n’avaient trouvé la moindre trace de la fugitive. Le premier des dieux avait bien du se rendre à l’évidence : elle n’avait aucunement l’intention de revenir dans l’immédiat. Il ressentait cela comme un défi et ne décolérait pas depuis. Une bonne partie de la Grèce et du pourtour méditerranéen étaient plongés dans l’obscurité, le tonnerre roulait et la foudre s’abattait avec fracas.

Les jours suivant, la présence de la Déesse se répandit comme une traînée de poudre dans la forêt et la lande. A chacune de ses promenades, guidée par l’inévitable Hero qui ne la quittait pas d’une semelle, elle rencontrait de nouveaux lutins, mais aussi des elfes, des korrigans et … des fées. Celles-ci étaient toutes, sans exception, extraordinairement belles, extrêmement tristes et diaphanes au point d’en paraître transparentes. La déesse apprit qu’elles dépérissaient ainsi depuis que leur reine avait été enlevée par un puissant mage des contrées boréales. Elles avaient longtemps espéré sa délivrance et son retour, mais la reine avait découvert son amour pour son ravisseur et régnait à présent sur un univers de neige et de glace. Lors d’une nuit de pleine lune, quand tout le petit peuple dansait sous les rayons magiques, l’impertinent Hero, juché sur l’épaule de la Déesse, glissa à son oreille : « Comprends-tu maintenant pourquoi je trouve les humaines et toi ma Déesse infiniment plus séduisantes que ces fées dévêtues et jolies mais inconsistantes ? » Elle se tourna vers lui et lui répondit : « Je comprends surtout deux choses : la première est qu’elles sont très malheureuses et que s’il ne se passe rien, elles vont peu à peu disparaître et la seconde que tu as encore joué au voyeur, petit monstre ! » « Il y a si peu à voir » se moqua-t-il « que ça ne compte pas ! » Elle lui jeta un regard étrange et le posa ostensiblement dans l’herbe. Il en fut si surpris, que pour une fois, il resta muet.

Bien plus tard, quand le silence de la nuit se fut étendu sur la forêt, un petit lutin inquiet n’arrivait pas à trouver le sommeil. Il aurait aimé se lover dans les mains chaudes et douces de sa Déesse, sa présence lumineuse lui manquait, comme rien ne lui avait jamais manqué et il se demandait encore, comment quelques mots ironiques avaient pu lui valoir cette mise à l’écart. Dans son petit coeur de lutin, il se sentait … pire il se savait … exclu, banni, exilé du cœur de sa Déesse. Elle était repartie sur son nuage sans même lui dire bonne nuit. Une idée germa alors dans son esprit. Il devait monter la voir. Maintenant. Quand il leva les yeux vers le nuage, calé entre les couronnes des arbres, il faillit renoncer devant l’énormité de la tâche. Les arbres centenaires semblaient toucher le ciel. Mais une petite voix lui disait qu’il devait y aller, qu’il pouvait y arriver. En bordure de clairière, un grand talus couvert d’herbe et plus haut, de rochers, abritait une des grottes des lutins. Quelques arbres avaient poussé tout contre. Il escalada ce talus et put ainsi atteindre les premières branches tout heureux d’avoir trouvé un moyen d’arriver en haut du tronc, qui lui semblait un obstacle insurmontable. Il commença alors à grimper lentement, cherchant la prochaine branche au clair de lune, s’agrippant, glissant, montant. C’était exténuant ! De temps en temps, il jetait un regard vers le haut, mais sous la lumière diffuse de la lune et entre les frondaisons mouvantes le nuage semblait encore bien loin. Une fois, en se redressant, il oublia d’assurer sa prise et tomba dans un grand chuintement de feuilles froissées, plusieurs branches plus bas, atterrissant juste à côté d’un hibou en chasse, qui lui assena un petit coup d’aile d’un air mécontent avant de s’envoler. Il resta assis tout étourdi pendant un moment, avant de reprendre son ascension. Au bout d’un long moment d’efforts épuisants, il toucha enfin quelque chose de très doux et se pensa arrivé, mais ce qu’il tenait à pleines mains était la queue d’un écureuil, qui dormait paisiblement tout la haut et qui maintenant criait de colère. Il eut a peine la force de s’excuser, mais reprit courage en voyant le nuage juste au dessus de lui. Il se reposa un peu. Il devait maintenant avancer avec bien plus de précautions encore, car les branches devenaient très fines, il risquait de tomber à tout moment. Enfin il sentit sous ses doigts la masse cotonneuse et légère du nuage. Mais s’il était facile d’y grimper, il était bien plus grand qu’il ne l’avait imaginé. Quand enfin il arriva sur le dessus et qu’il la vit dormir sereine et belle, il s’écroula totalement exténué et s’endormit instantanément. L’aube dessinait une première ligne laiteuse, loin vers l’est.

La déesse et le lutin (suite et fin)

Quand la Déesse s’éveilla plus tard, sous la caresse des rayons de soleil, elle fut bien étonnée de voir une petite forme verte, roulée en boule dans un creux du nuage. Elle se cala confortablement dans les volutes cotonneuses et contempla attendrie, la petite silhouette endormie. Ce petit être malicieux avait pris en peu de temps beaucoup d’importance à ses yeux … peut-être même trop … A son réveil, il fut tout surpris de la trouver près de lui. Il lui fallut un petit moment pour se rappeler son ascension de la nuit et pourquoi il l’avait entreprise, mais en voyant son sourire, il décida de tout lui raconter. Elle l’écouta attentivement, sans l’interrompre. Il dit son sentiment d’abandon, son besoin irrépressible de monter la voir, son envie de se faire pardonner, sa longue et difficile montée dans la nuit, son épuisement, et malgré tout son fol espoir. Ainsi donc ce joyeux drille, ce petit être impertinent et moqueur lui montrait à la fois son cœur et son courage La Déesse émue installa doucement le petit lutin sur ses genoux et à son tour commença à parler : « Je viens d’un pays de soleil. Sur la plus haute montagne du pays, se situe la demeure des dieux. Ils sont immortels, puissants, doués, gâtés et presque tous beaux. Ils ne manquent de rien. Mais sais-tu à quoi ressemble l’Olympe ? A une cour d’école : on s’y chamaille, on s’y jalouse, on s’y bagarre. Au mieux, on y joue. Même si les dieux y habitent ensemble, ils vivent en fait chacun dans leur propre monde, un univers créé à leur mesure, à l’aune de leurs envies. Quand ces mondes interfèrent les uns avec les autres, les heurts sont inévitables. Chacun défend sa préséance. Les incidents sont nombreux. Zeus et ses frères Poséidon et Hadès se sont montrés si orgueilleux et intraitables qu’il a fallu séparer totalement leurs mondes. Zeus règne dans les cieux, Poséidon dans les océans et Hadès aux enfers. Zeus est malgré tout resté le maître des dieux et a choisi le Mont Olympe comme résidence. C’est là, que j’habitais, dans les nuages qui entourent toujours le sommet de la montagne, avec les autres dieux et déesses. Mais un soir, je suis tout simplement descendue de l’Olympe et je n’ai plus eu envie de remonter. Je suis partie d’un pas léger vers le couchant, d’abord en dansant sur les vagues de la mer, puis traversant un pays de vallons, de vergers, de champs, de rivières et de forêts, jusqu’à arriver ici au bord de l’océan. Je sais qu’on me cherche. Zeus n’est pas du genre à apprécier qu’on lui fausse compagnie. Je suis sûre qu’on doit l’entendre tonner par là-bas. Mais moi, je ne suis pas mécontente de vivre un moment parmi de paisibles lutins bucoliques, aussi insolents et farceurs soient-ils, plutôt qu’au milieu de dieux envieux, jaloux, et irascibles. »

Hero se demandait à quoi pouvaient bien ressembler ces dieux qui lui semblaient terribles et invivables. Comment sa Déesse pouvait-elle être l’une d’entre eux ? Et quels étaient ses pouvoirs ? Beaucoup de questions se pressaient dans sa petite tête, mais une grande agitation s’empara soudain de la forêt. En un clin d’œil il se retrouva assis sur l’épaule de la Déesse au milieu de la clairière, là où un groupe de petits lutins venait de déposer une petite fée évanouie qu’on apercevait à peine. Une autre fée très affaiblie pleurait assise à ses côtés. « Sans notre reine, nous allons toutes disparaître les unes après les autres » murmura-t-elle.

Cette détresse décida la Déesse à partir à la recherche du Palais du Mage dans le Grand Nord. A leur demande, elle emmena avec elle, Hero et la plus valide des fées, chacun perché sur une de ses épaules. Elle savait qu’en se déplaçant sous sa forme de déesse, elle risquait d’être découverte, mais cela n’avait plus d’importance. En sortant de la forêt, il lui sembla pendant un imperceptible moment, que là haut le char du soleil allait basculer sur terre et elle comprit que Helios l’avait vue. Elle avançait rapidement, empruntant à l’envers les chemins de la bise, pénétrant le pays de la neige et la glace, recherchant les signes d’une aura magique, qui lui indiqueraient où trouver le Mage et la Reine des Fées. Un air plus cristallin, une blancheur environnante plus irisée, lui montrèrent qu’elle prenait le bon chemin et soudain comme surgi de nulle part dans toute cette clarté, elle vit devant elle, un immense palais, scintillant comme une pierre précieuse. Elle s’arrêta un instant car elle n’avait jamais rien vu de pareil, puis s’approcha d’une monumentale porte. Elle fit un sourire d’encouragement à ses deux petits compagnons, puis frappa. Lentement la porte s’ouvrit d’elle-même. Ils traversèrent une vaste cour givrée et se retrouvèrent devant un escalier monumental en haut duquel les attendait un page vêtu de blanc. Il tenait en laisse un renard polaire. Avant d’entrer elle eut l’impression que très loin dans le ciel azur et froid, Helios lui faisait un petit clin d’œil et elle sentit une douce chaleur dans tout son corps. Le page les conduisit vers une salle somptueuse où le Mage, tout vêtu de fourrures paraissait les attendre.

Si l’apparition de la Déesse le décontenança quelque peu, il essaya de ne pas le montrer et s’adressa directement à la petite fée et au lutin : « Je sais pourquoi vous venez, mais votre démarche est inutile car votre reine a trouvé un nouveau royaume ! » « Vous devriez au moins les écouter » dit la Déesse en déposant ses deux petits compagnons devant le mage. Elle avait remarqué que la chaleur qui l’emplissait avait fondre le sol de givre sous ses pieds et elle se dirigea lentement vers la fenêtre, touchant ça et là un meuble précieux. Elle ouvrit la croisée et remarqua qu’Hélios était exactement au même endroit au dessus château. Elle lui fit un petit signe l’invitant à s’approcher sur son char. L’air s’adoucit soudain, se chargea d’une légère vapeur, comme une brume qui montait des murs de glace qui fondaient doucement quand le char du soleil grandit dans le ciel. Ayant pris la mesure de la catastrophe qui s’annonçait, le Mage inquiet lança une malédiction vers Hélios, mais seul un énorme éclat de rire lui répondit pendant que l’attelage semblait reprendre son ascension. Au même moment, la porte de la salle s’ouvrit livrant passage à la Reine des fées, toute emmitouflée de fourrures blanches qui faisaient d’elle une véritable Reine des neiges. Elle fit un geste apaisant vers le Mage et se pencha sur la petite fée transparente dont le visage rayonnait depuis son entrée. « Quelles nouvelles m’apportes-tu de notre pays ? » demanda-t-elle. Mais la petite fée ne put que dire : « Oh, majesté, il faut que vous reveniez, sinon nous allons toutes disparaître. » « Mais vous connaissez toutes parfaitement votre travail » rétorqua la Reine, « vous savez prendre soin de la nature et utiliser vos pouvoirs tout comme moi. » « Oui, mais nous avons remarqué que sans reine, nos pouvoirs diminuent, nous même nous affaiblissons, devenons de plus en plus évanescentes. Les petites fées les plus faibles sont tout simplement en train de se déliter, de se confondre petit à petit avec l’air. » répondit la fée. La reine était devenue aussi blanche que ses fourrures. Jamais elle n’aurait imaginé que le fait de rester dans le Grand Nord après être tombée amoureuse de son ravisseur pouvait mettre en danger la vie de son peuple. Elle eut un court aparté avec le Mage, puis revint vers les trois visiteurs : « Soyez nos invités pour cette journée. Demain matin je vous accompagnerai dans la Grande Forêt de l’Ouest. » La déesse s’approcha à nouveau de la fenêtre et fit signe à Hélios qu’il pouvait s’éloigner. « Qui êtes-vous ? » demanda une voix derrière elle. Elle vit que la Reine était en grande conversation avec la petite fée et Hero et fit face au Mage : « Je suis une déesse de l’Olympe et c’est par hasard que je suis arrivée dans la grande forêt. Je me suis attachée à ce petit peuple et j’aimerais bien les aider, mais je ne pourrai pas rester avec eux pour toujours. » Il resta un instant silencieux puis ajouta en regardant en direction de la reine : « Vous avez rompu notre belle harmonie en arrivant ici. Maintenant elle voudra repartir et je l’aime trop pour l’en empêcher … ». « Et pourquoi ne viendriez vous pas avec elle ? » demanda la Déesse ?

C’est ainsi que la Déesse, Hero, la petite fée, la Reine et le Mage se mirent en route. Ils arrivèrent à destination un peu avant la grande fête de Beltane et la joie des fées fut immense de revoir leur reine. Les préparatifs pour la fête furent décuplés. Toutes les petites fées se mirent à revivre, à retrouver leurs couleurs, leur entrain, leurs pouvoirs. La Reine prenait du temps pour chacune d’elle et les entraînait dans de longues promenades dans les bois et les prés. Les fleurs se mirent à fleurir dans une profusion désordonnée et joyeuse, les feuilles des arbres brillaient, le sous bois bruissait de vie. Les elfes se remirent à chanter des chansons aussi joyeuses que la danse des papillons. Seul le Mage, assis dans la clairière, semblait absent et perdu. La Déesse le voyant humble et démuni l’invita à la suivre près de la source qu’elle avait découverte en arrivant. Ils eurent une très longue conversation, surveillés jalousement dans les hautes herbes par Hero, qui ne voyait pas ce tête à tête d’un très bon œil. Et quand le Mage et la déesse se mirent à rire, il n’y tint plus et les rejoignit. Mais ce qu’il apprit amena également un sourire sur son petit visage mutin.

Le matin de Beltane, quand tout le monde était plongé fébrilement dans les préparatifs, on entendit soudain des coups de tonnerre tout proches et une forme lumineuse se matérialisa dans la clairière. Une fois la lumière dissipée, les fées, les elfes et les lutins virent un bel homme, de stature imposante, qui portait une étrange toge blanche et un éclair en or dans sa main gauche. « Je suis Zeus » dit-il d’une voix profonde « et une des déesses de notre royaume semble s’être égarée par ici ! » Nullement intimidée, la Déesse vint au-devant de lui et tout en plaisantant sur le fait que les dieux ne se perdaient jamais, elle invita Zeus à participer à la fête qui se préparait. Bon vivant, toujours prêt à la fête, et charmé par la beauté des fées et des elfes, le dieu ne se fit guère prier.

Et c’est ainsi qu’en cette soirée de printemps calme au bord de l’océan, deux dieux de l’Olympe et un mage du Grand Nord furent les invités du Petit Peuple. Les libations se succédaient, les conversations devinrent de plus en plus animées. Le plus bavard fut Hero, qui s’installa crânement à côté de Zeus et lui narra toute l’expédition vers le Grand Nord pour retrouver la Reine des Fées. Depuis le matin, on lui avait confié la délicate mission de servir de guide au maître des dieux et de répondre à tous ses désirs. Et ma foi, il s’était fort bien acquitté de ce qu’on exigeait de lui, puisque Zeus était d’excellente humeur et ne tarissait pas d’éloges sur le lutin, la forêt, l’hospitalité du petit peuple et l’océan sauvage (dans lequel il avait jeté une poignée de petit éclairs en riant et en hurlant : « Salut Poséidon ! »). Plus tard, il demanda au maître des dieux qui était cette déesse qui avait un nom ressemblant au sien : « Il paraîtrait qu’elle soit insolente, boudeuse, colérique, curieuse, râleuse et très jolie. Ah, j’oubliais, extrêmement jalouse aussi. » Zeus partit d’un énorme éclat de rire et quand il se fut calmé, s’enquit auprès de Hero d’où il connaissait aussi bien son épouse. Le lutin vira au cramoisi et chercha du regard la Déesse. Mais le maître de l’Olympe qui s’était pris d’amitié pour le petit bonhomme l’attrapa et l’élevant à hauteur de son visage lui dit : « Tu es minuscule, mais ton courage et ta gentillesse sont bien plus grands que toi. Si tu as un souhait, parle ! Je l’exaucerai ! »

Sans réfléchir une seule seconde, Hero annonça : « Je veux épouser ma déesse ! » « C’est à elle seule de décider » reprit Zeus, « mais si elle veut bien de toi, je peux te donner la taille adéquate, pour qu’elle ait un époux et non un jouet. Reviens me voir quand tu auras sa réponse. » Et pendant que Hero se mettait à la recherche de la Déesse, Zeus, intrigué par ce personnage qui venaient des glaces éternelles, plongea dans une discussion animée avec le Mage.

La voile de la nuit scintillait de millions d’étoiles et la lune pâle et ronde semblait vouloir se nicher dans la ramure des plus hauts arbres tellement elle semblait proche. La vieille forêt bruissait de mille frémissements, vibrait de toute la vie qui renaissait. Malgré la fraîcheur, la fête s’éternisait. Personne n’osait briser la magie de cette nuit. Quand lentement, le ciel commença à pâlir vers l’Orient, Zeus escorta la Reine au milieu de la clairière. Celle-ci prit alors la parole : « Voici, ce que nous avons décidé. Je serai parmi vous tous les ans, de Beltane à Samain, pendant toute la période où la nature a le plus besoin de tous nos soins. Et je repartirai dans le pays des neiges et des glaces pour le reste de l’année. La Déesse quant à elle, épousera Hero et restera avec vous pour vous aider et vous protéger quand je ne serai pas là. Zeus a accepté qu’elle partage son temps entre notre forêt qu’elle a appris à aimer et l’Olympe. Et maintenant mes amis, prenons un peu de repos.» Un tonnerre d’applaudissements salua ce petit discours et bientôt chacun se retira chez lui. Avant de rejoindre l’Olympe, Zeus fit un petit détour par la source où tout avait commencé et pointa son éclair d’or sur Hero assis dans la mousse en compagnie de sa Déesse au pied d’un immense saule pleureur. Aussitôt celui-ci se transforma en un elfe élancé et d’une grande beauté … mais il restait au fond de ses yeux, le même éclair de malice que quand il était un minuscule lutin. Content de lui-même comme un enfant, Zeus ébouriffa au passage les cheveux de la Déesse car il savait combien toutes les femmes détestent cela et que ça l’amusait beaucoup de la faire enrager un peu en échange de toute l’inquiétude qu’elle lui avait causée et sur un dernier éclat de rire, disparût dans le nuage d’orage qui l’attendait au dessus de la forêt.

Depuis, la Grande Forêt de l’Ouest continue à vivre paisiblement dans son cocon magique sous la protection de la Reine des Fées et d’une déesse en balade, qui était tombée amoureuse de ce petit coin de terre et d’un lutin irrévérencieux …

vendredi 2 mai 2008

Indigo


Indigo,

Obscurité faite couleur,

Sirocco,

Tempête de sable sur les cœurs …

La vie

Se perd dans un néant opaque

La magie

Se délite au rythme du ressac …

Ciel noir,

Lourd d’orages menaçants

Désespoir,

Mal-être lancinant …

Roseau,

Plié par la douleur,

Indigo,

Obscurité faite couleur …