mercredi 28 novembre 2007

Tourbillon


(illustration aimablement mise à disposition par Mano -

http://www.manoz.fr/dotclear/index.php/)




Tournent les heures …

Et dans la nuit, mes pensées,

Tournent les danseurs,

Tourne la ronde des fées.

Tournent les pages

Et tourne la vie.

Tournent les images,

Qui virevoltent à l’envie.

Tournent les étoiles,

Tournent les rêves,

Tournent les voiles,

Que le vent soulève.

Tournent les airs de fête,

Tournent les manèges,

Tournent les têtes :

Parfum de sortilège …

Que se retourne la terre

Et se détournent les chemins,

Mon âme buissonnière

Tournoie dans ton ciel serein.

Le noir te va si bien


Noire est la nuit ... et la tristesse ...
mais noire est aussi la magie ... et la séduction ...



Le noir te va si bien !

Tu parais plus humaine

Quand ton regard

Brille de larmes

Et que l’on voit courir

La souffrance

Sur les méandres de ton âme.

Les cernes ombrent tes yeux

Bien mieux que les fards

Et te rendent émouvante,

Fragile …

La colère te rend belle !

Si tu t’abandonnes

A la rage, c’est en reine

Comme ces frémissantes panthères

Prêtes à bondir,

Qu’on aimerait dompter

Mais qui ne seront jamais

Tout à fait

Apprivoisées.

Farouches …

Tu es une rebelle de l’ombre !

Toujours tu l’as été,

Toi

La paisible,

Qui passe ta vie à te battre

Contre toutes les injustices,

Les moulins à vents,

Les diktats de l’air

Du temps

Et pour tous ces petits riens …

La liberté … l’amour …

Ton sourire ne fait plus recette

Ni ta lumière,

Ni ta douceur.

Les fées dorment dans des livres fermés,

Les muses ont oublié les poètes,

Même les histoires finissent mal

La vie se décline

En couleurs sombres.

Arrête de rire,

Tu devrais vraiment me croire,

Tu es faite

Pour le noir !


mardi 27 novembre 2007

Couleurs d'automne


L'automne toujours avec son atmosphère un peu hors du temps, sa magie mélancolique ...















La nuit

Hésite à s’en aller.

Elle jette sur ses épaules

Sa lourde cape de voyageuse

Dont les pans traînent,

En brume

Derrière elle.

Elle éteint au passage

Les rares étoiles qui tenaient tête

Aux nuages.

Très lentement

L’anthracite devient gris épais

Et un jour incertain

S’installe.

Nulle lueur rose vers l’Orient,

Nul chant d’oiseau

Ne saluent son arrivée.

Les heures s’égrènent

Dans d’infimes changements

De grisaille.

Vers midi le monde se fige

Un instant,

Dans une luminosité perlée

Avant de basculer

Sous le premier rayon

De soleil.

Comme par magie

Le ciel s’est teint en bleu,

Profond.

L’après-midi

Retient son souffle,

Pour perdurer un peu.

Le pâle soleil d’automne

Se démultiplie

Dans la flamboyance

Or et rousse

Des arbres,

Avant de disparaître

En feu d’artifice

Pourpre,

Dans la sérénité du crépuscule.

Majestueusement

La nuit revient.

Souriant de sa bouche

De lune,

Elle jette

Ses étoiles par poignées

Dans les cieux …

dimanche 25 novembre 2007

Rimbaud


Rimbaud

J’ai rencontré Rimbaud par une belle journée d’été. Il était assis, adossé à un arbre immense, les yeux perdus dans le vague, en bordure de la forêt de Brocéliande. Il ne m’a pas entendue arriver. C’est seulement quand je me suis retrouvée entre le soleil et lui, qu’il m’a regardée et m’a souri. Sans savoir pourquoi, je me suis assise à côté de lui et nous avons commencé à parler. De Brocéliande, de poésie, de Rimbaud … Longtemps avant de savoir qu’il portait un nom d’apôtre, pour moi, il a été Rimbaud. Pendant plus d’une heure, nous avons alterné conversation et silence. Je l’ai quitté sur la pointe des pieds, le laissant à ses pensées.

Le lendemain, je l’ai trouvé à la même place. Il semblait m’attendre. Un grand sourire a illuminé son visage à mon arrivée. Il s’est levé d’un bond et m’a invitée à une promenade en forêt. Nous avons marché ensemble dans une mystérieuse cathédrale de verdure. Du vert, à perdre haleine … vert tendre des frondaisons frémissantes, qui filtraient de minuscules rayons de soleil dansants, vert lumineux des clairières, vert émeraude quand les arbres se faisaient plus serrés, vert dru du gazon et de la mousse au sol. Une lumière étrange baignait l’endroit ajoutant encore à son côté magique. Je crois que je n’aurais pas été étonnée outre mesure, d’apercevoir l’ombre de Merlin derrière un rocher. Rimbaud semblait connaître tous les sentiers, tous les ruisseaux et toutes les légendes. Je l’écoutais, bouche bée, comme une enfant. « Brocéliande m’habite » disait-il. Il parlait de cet endroit, comme s’il en faisait partie, avec une émotion profonde, presque avec fièvre. Je le prenais pour un breton passionné par sa région et par ses rêves. Quand nous avons retrouvé mon chemin habituel, il m’a simplement dit : « Demain, nous irons au bord de la mer. Je vous attendrai à neuf heures, près du calvaire, sur la route de Ploërmel ». J’ai accepté, sans réfléchir une seconde. Plus tard, je me suis dit en souriant toute seule, que la magie de Brocéliande devait être puissante… ou que j’étais un peu stupide.

Il m’attendait, à côté de sa voiture, à l’endroit convenu, quand je suis arrivée, peu avant neuf heures. Il semblait heureux de me voir et m’a gentiment ouvert la porte côté passager, avant de s’installer à son tour. Nous avons roulé lentement, vers le Golfe du Morbihan, fenêtres ouvertes, goûtant la douceur du soleil et de la brise et guettant les premières saveurs iodées dans l’air. Nous nous sommes arrêtés près d’un sentier de chèvres, qui dévalait de façon fort aventureuse vers l’océan. En bas, nous attendait une longue plage presque déserte, entrecoupée de rochers. Nous avons déposé nos affaires au pied de la falaise et sans un mot, il m’a pris par la main et nous avons couru vers l’eau. Nous avons marché longtemps, au ras des petites vagues qui venaient mourir sur la grève avant de nous asseoir dans le sable chaud et de regarder la mer. Elle dansait en bleu et argent, comme vêtue de milliers de petits miroirs. Près des rochers, elle bondissait en fines arabesques d’écume et enlaçait les pierres noires et luisantes. Le ciel couleur myosotis était animé de petits nuages frisés et par le vol incessant des oiseaux de mer. Au loin, quelques voiliers traçaient leurs mystérieux sillons dans l’onde. C’était un de ces moments de plénitude parfaite comme seuls la nature ou l’amour savent en donner. En écho à mes pensées, d’une voix à la fois douce et grave, Rimbaud a commencé à réciter, comme pour lui même :

« Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme. » *

Les jours suivants, j’ai passé beaucoup de temps avec Rimbaud. Souvent, il m’emmenait explorer « sa » forêt. Il aimait s’asseoir sur les berges du ruisseau du Pas du Houx ou de la Chèvre et me raconter les anciennes légendes. Parfois, nous restions longtemps silencieux, goûtant l’enchantement des lieux, rêvant aux fées et aux chevaliers. Le temps s’écoulait comme une prière. Petit à petit, il s’est mis à parler de lui. A petites phrases discrètes d’abord. Puis la confiance a grandi entre nous, comme ces jeunes arbres qui s’élançaient encore tendres et souples aspirant à devenir un jour, pareils à ces frênes immenses et majestueux, qui nous entouraient. J’ai découvert un homme intelligent, sensible, passionné, artiste, mais également un homme compliqué, tourmenté, impatient, qui affirmait ne supporter aucune sorte d’autorité. Il se disait anarchiste et me demandait en souriant, si je trouvais cela grave. Au fil des conversations j’ai appris qu’il venait d’une région du centre, alors que je le prenais pour un autochtone. Lui, qui se donnait des airs de rebelle et de poète maudit était maire d’une petite ville et totalement au service de ses concitoyens. J’ai appris peu à peu à découvrir ses paradoxes, ses côtés attachants. Il vénérait les mots et ceux qui savaient s’en servir avec intelligence et beauté. Il passait une partie de ses nuits à écrire et la plupart de ses courts moments de loisirs à lire. La magie du verbe et de l’écriture le fascinait. Il aimait s’exprimer autant que j’aimais l’écouter. Quand il parlait, ses traits s’animaient. Sa beauté presque juvénile, faisait place à un charme profond, indissociable de ses mots et de son regard. Il était venu en Bretagne pour se reposer. Plusieurs projets importants pour sa ville, l’avaient amené à négliger totalement sa santé et son cœur un peu fragile n’avait pas résisté au stress et au surmenage chronique. Après un séjour à l’hôpital, les médecins lui avaient impérativement conseillé le repos. Il avait choisi le Morbihan des vacances de son enfance et également la solitude. Il m’apprit qu’il était marié, mais que son épouse ne devait le rejoindre que pour les tout derniers jours de son séjour. J’avais de mon côté accepté avec joie, l’offre d’une amie, d’habiter son petit cottage pendant qu’elle passait un mois aux Etats-Unis. L’idée de pouvoir paresser, lire et écrire à mon envie, pendant plusieurs semaines, loin de l’animation familiale n’était pas pour me déplaire. Nos confidences sur notre entourage s’arrêtèrent là.

Durant ces jours, nos pas nous ont porté dans la forêt, sur la lande, en haut des falaises et au ras des vagues. Nous avons passé des heures assis au pied d’arbres centenaires à discuter et presque autant assis silencieux à contempler l’océan. La forêt et la mer étaient notre demeure. Il me livrait une partie de son âme et j’ai osé lui lire certains de mes poèmes. Il me livrait sa Brocéliande et au fil de nos promenades. Le Val sans Retour ou l’Etang du Miroir aux Fées n’eurent plus de secrets pour moi. Rimbaud devenait Merlin et j’étais Viviane et nous dansions pour l’éternité, au clair de lune, autour de la Fontaine de Barenton. Je me suis rarement sentie aussi proche de quelqu’un. Mais jamais nous ne troublions l’intimité de l’autre, jamais nous ne nous rendions visite en dehors de nos rencontres quotidiennes.

Un soir pourtant je l’ai trouvé devant ma porte, alors que nous venions de nous quitter deux heures plus tôt et que nous avions passé une partie de l’après-midi à bavarder près du Siège de Merlin. A la place de l’habituel tee shirt, il portait une chemise blanche avec son jean. Il m’a souri timidement et m’a demandé s’il pouvait m’inviter à dîner. Surprise mais ravie, j’ai enfilé une robe en lin, des sandales, j’ai pris mon sac et un gilet et nous sommes partis en direction de la mer.

Nous avons mangé du poisson grillé sur une jolie terrasse, parlant peu et de choses anodines. La douceur de l’air était presque palpable et une petite brise tiède nous apportait le parfum de la mer. Le velours du ciel était piqué d’une myriade d’étoiles bienveillantes, qui donnaient envie de se promener dans la voie lactée. A la fin du dîner, il a pris ma main et nous sommes allés vers la plage. Le sable était encore tiède de la journée. L’océan scintillait sous la lune. Des gerbes d’écumes éclairaient la base des falaises, qui projetaient leur masse sombre sur la grève. Soudain ses bras se sont refermés sur moi et j’ai senti la douceur de ses lèvres sur les miennes. Nous nous sommes embrassés avec timidité et tendresse, avec fougue et passion, pendant un long moment. Puis il m’a fait asseoir tout doucement sur le sable et s’est assis derrière moi, m’enveloppant de ses bras et nous sommes restés longtemps, sans un mot, à regarder la nuit et l’eau et à goûter la proximité de l’autre. Bien plus tard, sa bouche posée contre mon oreille, il a murmuré des mots doux en m’avouant combien il avait aimé passer tout ce temps avec moi, combien j’étais devenue important dans sa vie … il a même utilisé le mot « essentielle » en précisant : « dans tous les sens du terme ». J’étais si émue, que j’étais incapable de répondre, me contentant de nicher ma tête au creux de son épaule et de laisser couler silencieusement quelques larmes. Il les a séchées, tendrement, de ses baisers. Quand il m’a raccompagnée chez moi, tard dans la nuit, je me suis serrée contre lui, j’ai plongé mon regard dans le sien et je lui ai dit tout simplement, que je ressentais exactement la même chose. Je lui ai volé un dernier baiser, avant de m’enfuir comme une ombre.

J’ai très peu dormi cette nuit là, appréhendant le lendemain. J’ai repassé dans ma tête chaque détail de cette soirée pas comme les autres, si pleine de tendresse, mais aussi de paroles que nous n’avions pas dites. J’avais à la fois peur de revoir Rimbaud, peur d’avoir gâché cette étrange amitié et encore plus peur de l’avoir perdu. Pourtant, quand nous nous sommes retrouvés, en bordure de cette forêt magique, responsable de notre rencontre, il m’a souri, a posé un baiser léger sur mes lèvres, m’a pris la main et rien dans cette promenade et dans notre bavardage n’était vraiment différent des autres jours. Sauf qu’il m’a raccompagnée jusqu’à ma porte et que je lui ai proposé de partager mon dîner léger. Et dans la nuit montante, sur un banc, près d’un immense massif d’hortensias, nous avons osé parler de « nous », de notre entourage, d’amour, d’amitié, de complicité. Nous avons laissé libre cours à toutes ces émotions accumulées, ces sentiments que nous avions soigneusement enfouis au plus profond de nous-mêmes. Les mots eux-mêmes n’étaient plus les mêmes et semblaient avoir besoin de gestes. Nous aurions aimé être héroïques, nous avons été tout simplement humains et amoureux.

Cette nuit et les suivantes ont été les nôtres. L’enchantement de Brocéliande nous protégeait et nous enveloppait. Viviane et Merlin nous approuvaient.

Lorsque l’heure de repartir vers ma vie et de laisser Rimbaud à la sienne a sonné, nulle amertume dans nos cœurs, mais un lien aussi doux, aussi fin et aussi solide qu’un cordon de soie nous reliait à tout jamais. Rimbaud habitait mon âme et ma vie et il y est resté, invisible et présent… et quand nous avons la chance de pouvoir nous échapper du côté de Brocéliande, en rêve ou en réalité, nous le faisons dans l’allégresse, sans regrets, ni remords ….

* Sensation d’Arthur Rimbaud (extrait de Poésies)

jeudi 22 novembre 2007

Parlez-moi

Toujours dans l'art difficile du dialogue ...
non seulement dire ... mais écouter ... entendre ...







Parlez-moi … dites moi tout !

Vos élans, vos tabous,

Votre vie, vos émois,

Vos choix, vos désarrois,

Vos rêves, vos envies,

Vos éclats de rire, vos dépits,

Vos nuits sans sommeil,

Vos réveils,

Vos envols, vos réussites,

Et vos fuites …

Racontez-moi … vos peurs,

Vos coups de cœur,

Vos vides, vos regrets,

Vos remords secrets,

Votre solitude,

Toutes vos certitudes,

Vos émotions, vos larmes,

Votre poésie, votre charme,

Vos succès, vos galères,

Votre ciel et votre enfer …

Evoquez pour moi …

Vos tristesses et vos joies,

Vos fantasmes, vos espoirs,

Vos rêveries du soir,

Votre avenir, vos souvenirs,

Vos intimes désirs,

Vos dégoûts, vos tendresses,

Ce qui vous blesse,

Vos voyages, vos errances

Et toutes vos préférences.

Je vous en prie,

Levez vos interdits,

Parlez, dites, criez, hurlez !

Ou murmurez …

Je veux et peux tout entendre,

Suivre tous les méandres

De vos paroles,

Vos idées folles.

Brisez ce silence,

Porte noire de l’absence …

Juste te dire


Petite exploration des difficultés à se parler ... ce qu'on dit, ce qu'on ne sait pas dire ... ce qu'on voudrait dire ...











Juste te dire …

Non … rien … soupir …

Me taire comme d’habitude,

Apprivoiser la solitude,

Rester légère

Mais pas étrangère,

Distante

Et pourtant présente,

Discrète

Toujours secrète …

Juste te dire …

Mes rêves, mes désirs,

Mes pensées qui dansent

Dans le silence,

Mots délétères

Mourant dans une prière.

Voler dans ton ombre

Tel un ange sombre,

Etre l’air

Qui t’est nécessaire …

Juste te dire …

Non, juste te sourire …

Te laisser lever le voile

Qui cache les étoiles,

Te laisser découvrir

Derrière ce sourire,

La femme forte et fragile,

A la confiance tranquille,

Qui tisse son amour

Au fil des jours …

mardi 20 novembre 2007

Nouvelles aurores




Tant qu'il reste des rêves et de l'espérance ....







Regarder couler la vie

Entre sable et infini

Sublimer ces petits miracles

Qui finissent en débâcle,

Sentir cette grâce qui s’ignore,

Cet amour qui implore,

Se balancer au bord du vide

- Légère caresse insipide -

Cueillir les étoiles du néant,

Se perdre à fleur d’océan,

Mordre la poussière

De toutes les lunes délétères,

Mais garder cette étincelle,

Cette once d’espoir immortel,

Et oser croire encore

En de nouvelles aurores …

On the road again




Six heures ! Comme presque toujours, mon réveil interne fonctionne parfaitement. Je me lève, me rends à la salle de bain. J’allume le plafonnier. Reflétée par la blancheur des murs, la lumière m’agresse un moment. Toilette. Habillage. Curieusement, je sais quoi mettre … pas d’hésitation. Tailleur pantalon sombre, chemisier clair. Un petit moment de réflexion pour les dessous. Ma main attrape ce qu’il a désigné un jour sous le terme de « crise cardiaque ». J’ai besoin de ces dessous là, aujourd’hui, tout comme un moment plus tard, je n’aurai aucune hésitation sur l’eau de toilette à choisir. Je les enfile, me regarde dans la grande glace, me permets une toute petite évasion. Aimerait-il glisser ses mains sous la douceur de la soie du chemisier ? Serait-il ému par les dentelles dessous ? Une petite tristesse s’insinue dans le rêve. Depuis combien de temps ma lingerie est-elle un « no man’s land » ? Depuis combien de temps, suis-je un « no man’s land » ? Ne pas réfléchir. Descendre, faire couler un café. Préparatifs.

Vers 7h30, je pars dans le petit matin. On voit les dernières étoiles. Surtout celle, qui est si brillante encore vers le sud-est, Sirius peut être ? A l’orient, le ciel se déchire en lambeaux blafards, qui grandissent. Et soudain, les premiers rayons … un jaune timide se diffuse. Puis c’est la munificence des ors et des roux, des roses et des pourpres. Contraste des nuages d’encre, des stries couleur souris, des balles de coton lactées. Les cieux déclinent les splendeurs changeantes des matins d’automne. Des lanières de brumes sont accrochées au ras du sol.

Autoroute. Les pensées tournent au rythme des roues. Un motard sombre sur une grosse cylindrée un peu vieillotte me dépasse. La petite douleur sourde qui accompagne les battements de mon cœur devient fulgurante. L’air manque. Comment vivre quand on ne sait plus rien de l’être aimé ? Comment continuer à imaginer sa vie ? Est-il toujours, lui aussi, une ombre rapide qui avale le bitume ? Impossible de refouler les craintes d’accidents qui me taraudent si souvent. Combien de chutes depuis la dernière que je connais ? Ou plus grave peut être? Mon cœur s’emballe, je dois me forcer à respirer normalement.

La brume s’épaissit. J’entre dans la première nappe de brouillard. Ah ! s’y enfoncer, comme dans une couette moelleuse. Dormir, ne pas penser. Il n’y a sûrement pas de brouillard là, où il se trouve. Si, penser. Penser à autre chose. Faire autre chose. S’oublier soi-même dans un travail inhabituel, se perdre dans les misères des autres. Fuir. Et reconnaître que c’est flouer tout le monde.

Je sors de la plaque cotonneuse comme d’un tunnel. Un vrai soleil brille. Flamboyance des arbres, vert dru et étincelant de l’herbe mouillée. Comment sont les arbres de « notre » forêt ? Les tilleuls du parc ? Comment y vit-il ? Est-il assis dans le canapé devant le feu ? Monte-t-il parfois là-haut ? Non, n’y pense pas, tu dois guetter la prochaine sortie d’autoroute.

Les kilomètres se succèdent, d’autres passages dans le brouillard, les zones industrielles, les travaux autoroutiers, les campagnes, les coquets villages avec leurs maisons presque toutes blanches et leurs toits sombres, les murs anti-bruit qui bordent ces villages et qui sont, ma foi, assez originaux : des bûches, des briques, des pierres en terrasses, des vignes vierges amarantes qui cachent des bétons. Et toujours, des camions, des camions … des camions. Plus tard, le paysage devient vallonné, même l’autoroute joue aux montagnes russes. Les brumes ont complètement disparu maintenant. Des bois, des collines, le soleil qui joue à cache-cache, avec des cumulus de tailles diverses … paysages de carte postale.

Encore plus tard, le trafic intense, les bouchons et ralentissements me forcent à me concentrer sur la route. C’est une bonne chose. J’arrive à dominer mon inquiétude, mes doutes. Pourquoi aujourd’hui ? Parfois les trajets en voiture ne sont qu’une longue rêverie douce, une proximité tendre … Et puis dans les cinquante derniers kilomètres, une chanson à la radio … une de « nos » chansons. Chamade effrénée … chut, mon cœur ! Chut !

dimanche 18 novembre 2007

Les coeurs qui partent en voyage






Les cœurs qui partent en voyage,

Où vont-ils donc vagabonder ?

Dans quels chemins peu sages

Risquent-ils de s’égarer ?

Dans quelle équipée sauvage

Se laisseront-ils emporter ?

Ces cœurs qui partent en voyage,

Ouvrent leurs ailes pour s’envoler

Et laissent dans leur sillage

Un subtil parfum de liberté,

Ils montent à travers les nuages

Vers des cieux ensoleillés …

Le bonheur s'ouvre comme une fleur


Parfois bonheur et douleur sont bien plus proches qu'on ne le dit ...










Au milieu de nulle part,

Le temps s’égare

Dans un rêve éveillé

Par une porte entrebâillée.

Rien n’a plus d’importance

Entre rire et silence

Le bonheur s’ouvre comme une fleur

Pour abriter la douleur.


vendredi 16 novembre 2007

Envie d'ailleurs



Envie d’ailleurs,

De parfums, de couleurs,

Echapper au silence,

Prendre tous les trains en partance,

Hisser les voiles,

Toucher les étoiles,

Rêver de tous les bleus

Des mers et des cieux,

Danser sur les arcs-en-ciel,

S’envoler du réel,

Goûter aux paradis

Interdits,

Tutoyer l’Equateur,

Apprivoiser le bonheur,

Plonger dans d’autres océans,

Flirter au bord du néant,

Etre nomade de ville en ville,

Trouver asile

Dans tous les ports

Entre sud et nord,

Emprunter ses ailes au vent,

Explorer le firmament,

Dans un élan gracile

Sauter d’île en île,

Se poser enfin sur son nuage,

Fin du voyage …

Prière dans l'ombre


Prières ... souhaits ... rêves ... mots ...

Les voici au creux de ma main ... je les éparpille d'un souffle, les confie à la brise ou aux fées ... parfois à une page blanche ...




J’aimerais

Que le temps puisse s’arrêter

Sur une seconde d’éternité,

L’instant d’un souffle, d’un soupir,

L’espace d’un désir,

L’infime moment qu’il faut aux étreintes

Pour laisser leur empreinte …


J’aimerais

Que les cieux en pleurs

Lavent les larmes des cœurs,

Que les mots des amants

Durent plus que les diamants,

Qu’aucun soleil ne se consume

Pour qu’une pâle étoile s’allume …


J’aimerais

Que nul livre ne se ferme

Avant d’arriver à son terme,

Que nul appel ne soit lancé en vain,

Que des fleurs parfument les chemins,

Que les âmes en détresse

Retrouvent douceur et tendresse …


Ô … j’aimerais …

Que les poèmes dansent avec l’océan,

Que l’amour vole sur les ailes du vent,

Que les enfants jouent dans les nuages,

Que les muses ne soient pas sages,

Que les rêves éclosent en papillons,

Que la raison n’ait pas toujours raison …

Au creux d'une perle de rosée


Bulle légère au dessin éphémère entre beauté et illusion ...







Au creux d’une perle de rosée,

A l’aile poudrée d’un papillon,

Le trait fragile de l’illusion

Dessine les courbes de la beauté.

Il s’attarde sur la corolle d’une fleur,

Entoure l’œil humide d’un faon,

Pâlit la neige de blancheur,

Mais perd la trace folle du vent.

Il joue sur un rayon de lune,

Qui se balance dans le ciel

Et chasse le sable de la dune,

Comme un nuage, couleur de miel.

Il sème des étoiles au hasard,

Sur le velours sombre de la nuit,

Puis au matin colore de fards

La nature encore endormie.

Il se fait léger comme une plume,

Pour rendre le sourire d’un enfant.

Il trace les volutes en écume

Des vagues poussées par le vent.

Il court entre les lignes d’un poème,

Il donne forme aux rêves bleus

Et quand je t’écris que je t’aime,

Il fait de toi … un dieu.